« Apprendre
qu’il nous reste statistiquement quatorze mille cinq cent soixante
jours à
vivre et qu’en écrivant une page par jour cela constitue quarante-huit
livres
de trois cents pages et un de cent cinquante, ronronner, discuter au
cœur de
l’Australie avec un Allemand fraîchement rencontré qui confirme que
l’on a bien
reconnu la Croix
du Sud – et commettre en l’écrivant le lapsus suivant : « la
joie du
sud » –, fumer une cigarette roulée sous une fine pluie dans un
village de
montagne tout en improvisant un air de jazz à bouche fermée, tenir sur
son
ventre épuisé un nouveau-né tout chaud et tout mouillé, chausser des
espadrilles au sortir de l’hiver... »
Et
si tout un
chacun avait cette impression finalement de ne pas avoir vécu ? Que le
temps a
filé entre ses doigts sans qu’il n’en reste rien ? Si nous avions tous
besoin
un jour, pour nous remettre à avancer, de fredonner la litanie du Sel de la vie ?